Famille : Psittacidae
Texte © Dr. Gianfranco Colombo
Traduction en français par Catherine Collin
Dans le monde entier il est commun d’observer des rassemblements vespéraux d’oiseaux, parfois nommés « roosting ». Bien que souvent inattentifs et pris par nos activités quotidiennes, nous ne manquons pas de remarquer ces évènements naturels qui éveillent notre curiosité et notre capacité d’émerveillement innés, sans toutefois abandonner nos récriminations à propos du raffut occasionné durant ces réunions et des malodorants « présents » nocturnes que nous retrouvons le matin suivant sur le trottoir.
Les rassemblements des Etourneaux sansonnets (Sturnus vulgaris) sont réputés dans nos villes comme le sont ceux des Corneilles mantelées (Corvus cornix) et de tant d’autres oiseaux, plus particulièrement ceux de la Bergeronnette grise (Motacilla alba) dans les avenues de Dublin et sur le toit du bureau de poste de Leicester en Angleterre ou encore ceux des trois millions d’Hirondelles rustiques (Hirundo rustica) dans les roselières de Durban en Afrique du Sud. L’Inde aussi avec son monde mystérieux et captivant connaît ses grands « roostings ». Un dortoir désordonné et retentissant, unique pour le grand nombre d’oiseaux présents mais encore plus parce que ce vacarme est émis par un oiseau qui a la caractéristique de compter parmi les volatiles possédant l’une des voix les plus stridentes dont l’incessant jacassement amplifie mille fois un tintamarre qui autrement pourrait être facilement toléré.
Par chance cela se passe en Inde où tous les animaux sans distinction sont aimés et protégés, nourris et souvent adorés, sinon, en d’autres lieux, les réactions pourraient s’avérer bien différentes.
Dans l’aire de Chandni Chowk l’une des avenues les plus importantes de New Delhi, capitale de l’Inde, lieu qui a vu dans le passé se dérouler l’une des plus sanglantes représailles du colonialisme anglais sur les partisans de l’indépendance indienne, se réunit le soir une énorme quantité de perruches arrivant de tous les coins de l’immense cité afin d’y passer la nuit. On ne sait combien elles sont, certains pensent des dizaines de milliers d’individus mais d’autres penchent pour un nombre incroyablement plus élevé.
La Perruche à collier (Psittacula krameri Scopoli, 1769) appartient à l’ordre Psittaciformes et à la famille Psittacidae, un ordre très vaste qui comprend à l’intérieur de 3 familles, plusieurs centaines d’espèces à l’origine dispersées sur tous les continents, à l’exception de la vieille Europe.
C’est l’un des psittacidés les plus connus et les plus communs dans la mesure où il fut l’un des premiers à être gardé en captivité, à tel point qu’aujourd’hui, à cause des fugues accidentelles ou des remises en liberté volontaires, on rencontre cette perruche nichant en colonies disséminées dans le monde entier.
L’étymologie du nom scientifique dérive du grec « Psittakos » = perroquet, dans la forme diminutive et « krameri » en mémoire du naturaliste autrichien Wilhelm Heinrich Kramer auquel Scopoli dédia la classification de cet oiseau exotique.
En Europe on l’appelle Rose-ringed Parakeet en anglais, Halsbandsittich en allemand, Cotorra de Kramer en espagnol, Parrocchetto dal collare en italien et Periquito-de-colar en portugais. Ces noms communs reprennent pour la plus grande part sa caractéristique morphologique particulière.
Zoogéographie
La Perruche à collier est originaire d’Afrique et d’Asie tropicale. Sur le continent africain on la trouve dans une étroite bande subsaharienne, bien délimitée, qui s’étend de la côte atlantique du Sénégal jusqu’aux rives de la mer Rouge au Soudan.
En Asie elle vit sur le sous-continent indien, des plaines du Pakistan jusqu’au Myanmar, restant toujours au Sud de la chaîne himalayenne et occupant entièrement la péninsule indienne.
À cause de l’homme nous la retrouvons désormais dans presque toutes les parties du monde où elle a été accidentellement ou volontairement introduite. Partant d’Angleterre, première nation européenne à expérimenter cette féralisation, elle a maintenant conquis de façon discontinue tout le continent européen avec des populations plus ou moins consistantes mais toujours sujettes à des disparitions impromptues pour des motifs encore à éclaircir.
L’Italie figure en bonne place dans ce classement, avec une présence notée dans les parcs de Rome, à Trieste, sur le lac Majeur, à Gènes, à Milan et tant d’autres villes encore, tous lieux où les conditions climatiques mais surtout la nourriture à disposition garantissent sa survie. Étant très sociable et émettant sans cesse son désagréable cri perçant, elle est aisément repérée par quiconque habite à proximité des lieux qu’elle fréquente.
Ecologie-Habitat
La Perruche à collier a deux habitats distincts qu’elle fréquente de manière confuse sans aucune restriction. Si en Afrique, puisqu’elle vit dans la bande semi désertique du Sahel, elle doit lutter contre les périodes de sécheresse que connait cette aire, se limitant à vivre en milieu de steppes arides, survivant souvent en petit nombre en dérobant les maigres récoltes de sorgho et de mil, dans la plaine indienne c’est une toute autre affaire.
Une prospérité souvent hors de proportion pour un oiseau qui a à sa disposition d’immenses rizières, des champs de maïs et tant d’autres délices auxquels il cause d’importants dégâts. Le nombre des présences est donc grandement déterminé par ces situations ! Néanmoins, cette perruche sait s’adapter, comme elle l’a fait en Europe et dans d’autres lieux où elle s’est trouvée vivre, à des conditions très différentes mais toujours acceptables.
En Inde, dans les centres urbains, elles sont devenues si abondantes et omniprésentes qu’elles dépassent en nombre ce que représente en Europe la présence du Moineau domestique (Passer domesticus), de l’Etourneau sansonnet (Sturnus vulgaris) ou du Pigeon biset (Columba livia). Elles ont pratiquement pris possession des espace anthropisés, occupant les rues, les parcs, les jardins ruraux mais surtout, les innombrables temples hindouistes.
Son habitat se caractérise par la présence d’aires arborées où se réunir et si possible nicher mais aussi de vastes plaines de préférence cultivées parce que cet oiseau est très terricole et aime passer une partie de son temps au sol. En Afrique il est beaucoup moins anthropisé qu’en Asie puisqu’il y est largement chassé et persécuté. Une lutte réciproque pour la survie ressentie largement plus ici que n’importe où ailleurs.
Morpho-physiologie
Comme il est habituel chez les perroquets arboricoles le vert est la couleur dominante de la livrée. Cette perruche est presqu’entièrement de cette couleur sauf pour le collier rosé et noir bien marqué chez le mâle et absent chez la femelle. Un vert très clair et brillant, tirant sur le bleu ciel ce qui est dû à la légère réfraction de la lumière sur ses couvertures. Le dessous de l’aile présente un coloris plus clair et jaunâtre. Le bec est orangé lumineux, très arqué comme chez tous les psittacidés et les pattes sont brunâtres avec des doigts zygodactyles. Les yeux sont noirs mais avec un anneau péri-occulaire d’un beau jaune orangé bien visible même à distance. Une caractéristique particulière à cet oiseau est sa longue queue pointue et en dégradé qui peut atteindre 22/25 cm sur les 40/45 cm de la longueur totale. Cette perruche pèse 150/170 grammes et son envergure est d’environ 50 cm. Son vol est très rapide et rectiligne grâce à ses ailes très étroites et fuselées, et s’accompagne immanquablement d’un coassant et aigu « kaak kaak » d’avertissement.
Quatre sous-espèces liées aux lieux habités et à de légères différences morphologiques ont été déterminées. Psittacula krameri krameri de l’Afrique subsaharienne, Psittacula krameri borealis, de l’Asie continentale, Psittacula krameri parvirostris, de l’extrême Ouest du Soudan, de l’Érythrée et de Djibouti, Psittacula krameri manillensis, de la partie sud de la péninsule indienne et du Sri Lanka.
Cette perruche étant l’une des espèces de psittacidés les plus communes dans les élevages à travers le monde, au moyen de techniques d’hybridation toujours actualisées un nombre prodigieux de mutations comprenant des couleurs et des particularités proprement incroyables a été obtenu. On peut voir par exemple des individus entièrement bleu ciel, d’autres entièrement jaune ou blanc ou gris ou bleu cobalt et d’autres encore panachés de couleurs qu’on n’aurait jamais imaginées.
Dans la nature cet oiseau peut être confondu avec des espèces congénères très ressemblantes partageant souvent les mêmes aires et que seuls les ornithologues avertis réussissent à déterminer avec précision à l’état sauvage.
Éthologie-Biologie reproductive
La Perruche à collier est un oiseau granivore et frugivore avec une préférence pour un régime ou l’autre selon les saisons, ceci étant sûrement dû à la période de maturation des différents aliments.
Pendant la période des récoltes elle préfère rôder, en volées assez importantes, à piller dans les campagnes cultivées, les cultures de céréales et de légumineuses, du riz au maïs, des lentilles au blé, des arachides au tournesol, des pois chiches aux petits pois ainsi que de tant d’autres graines oléagineuses mais leur nourriture favorite demeurant par-dessus tout les fruits.
Le tamarinier, si commun dans les plaines de l’Inde le long de ces routes sans fin qui raccordent sur des kilomètres et des kilomètres villes et zones rurales, est le plus souvent sa cible principale vu l’abondance ainsi que la douceur de ses fruits. Elle aime aussi beaucoup les mangues, les jujubes, les dattes, les papayes mais également les fleurs d’Erythrine et d’Acacia.
C’est une espèce qui présente un taux de succès élevé en ce qui concerne la reproduction, cela étant dû principalement au fait que cet oiseau installe son nid dans des trous de vieux arbres, des nids abandonnés par des pics et dans l’aire indienne, dans les combles des maisons, dans les monuments anciens et dans n’importe quelle crevasse disponible dans les murs des habitations. La niche est toujours installée à une bonne hauteur du sol. Le nid est pratiquement inexistant et les œufs sont pondus sur le substrat naturel se trouvant à l’intérieur du refuge choisi pour nicher. De 2 à 5 œufs très blancs et de forme très arrondie que la femelle couvera pendant environ 4 semaines y sont pondus. Les petits, dont la croissance est assez lente, prennent leur envol après 7 semaines, tendrement surveillés par les deux parents.
Comme tous les psittacidés cette perruche a une espérance de vie assez longue, pouvant facilement dépasser les 20 ans. Pour cette raison et pour l’importance de ses populations, l’espèce n’est pas considérée comme étant en danger, au contraire on a remarqué un sensible accroissement de la population globale.
Synonyme
Psittacus krameri Scopoli, 1769.
→ Pour des informations générales sur les Psittaciformes voir ici.
→ Pour apprécier la biodiversité au sein des PSITTACIFORMES cliquez ici.