Famille : Myrtaceae
Texte © Prof. Pietro Pavone
Traduction en français par Michel Olivié
Metrosideros excelsa Sol. ex Gaertn. est une espèce de la famille des Myrtaceae originaire des régions côtières de l’île du Nord de la Nouvelle-Zélande et introduite par la population locale dans l’île du Sud jusqu’à Dunedin.
On trouve Metrosideros excelsa dans son milieu naturel sous la forme de plantes soit isolées soit intégrées dans la forêt des zones côtières et de l’intérieur des terres.
Dans l’extrême Nord de l’île du Nord cette espèce est associée à la forêt de Kauris (Agathis australis (D. Don) Lindl.) mais dans certains secteurs elle forme une forêt à l’état pur.
Du fait de sa capacité à s’enraciner sur des substrats volcaniques elle a également colonisé l’île volcanique de Whakaari/White Island ( baie de l’Abondance) bien qu’elle y soit continuellement dérangée par les coulées de lave et des fumées toxiques.
On la rencontre aussi sur la petite île inhabitée de Moutohora (Whale Island) sous forme de petits arbustes qui poussent à proximité de fumerolles.
Dans l’intérieur des terres de l’île du Nord il existe des peuplements de Metrosidreos excelsa dans le haut plateau volcanique central, sur les rives des lacs de Rotorea, d’Okataina et Taupo et le long du fleuve Tarawera qui coule le long du flanc Nord du volcan du même nom. Autrefois elle était présente également sur les falaises du lac Waikaremoana (Te Urewera).
Les peuplements de l’intérieur proviennent sans doute de plantations effectuées par les Maoris et se sont par la suite étendus spontanément bien que les savants ne soient pas tous d’accord à ce sujet.
Les forêts de l’intérieur sont probablement en fait des fragments de la colonisation des surfaces laviques formées par le volcan Okataina à la fin du Pléistocène et au début de l’Holocène. On a découvert en Tasmanie les premiers fossiles pouvant être attribués au genre Metrosideros et leur présence indique que les espèces de ce genre existaient dans ces régions il y a environ 30 millions d’années.
En Australie il n’y a pas de Metrosideros très probablement parce qu’il n’existe pas sur ce continent d’habitats favorables et que les espèces qui pourraient y avoir vécu se sont éteintes.
On considère au contraire que la Nouvelle-Zélande pouvait mieux se prêter à leur épanouissement, du moins en ce qui concerne les espèces du sous-genre Metrosideros. D’autre part, sur la base de la vaste documentation relative aux fossiles découverts sur l’île (pollen datant de la fin du Paléocène et du début de l’Éocène et bois fossile du Miocène inférieur) et grâce à des études de phylogénétique, on peut supposer que des espèces appartenant à ce sous-genre de ce territoire se sont étendues à d’autres îles de l’Océanie jusqu’à la lointaine Polynésie.
Le vecteur de leur dispersion a certainement été le vent. Les longues distances ont été surmontées grâce au fait que les graines ont pu conserver leur viabilité aux basses températures qui sont apparues lors des glaciations du Pléistocène. Le nombre chromosomique est 2n = 22.
Le nom du genre Metrosideros vient du grec ancien “metra”, ventre, et “sideros”, fer, par référence à la dureté de son bois. Le terme “excelsa” signifie haute, élancée ou exceptionnelle, probablement à cause des dimensions de cette plante et de sa floraison massive.
Son nom vulgaire est Arbre de Noël de la Nouvelle-Zélande ce qui s’explique par le fait qu’il fleurit pendant la période de Noël dans ses lieux d’origine. En langue maorie on l’appelle Pohutukawa, ce qui veut dire “mouillé par les embruns” et désigne le milieu côtier auquel cette espèce s’est bien adaptée.
Joseph Banks (1743-1820) et Daniel Carl Solander (1733-1782) récoltèrent des échantillons de cette plante lors du premier voyage en 1769 de James Cook (1728-1779) en Nouvelle-Zélande mais ce fut Joseph Gaertner (1732-1791) qui publia de façon correcte dans le De Fructibus et Seminibus Plantarium (Fruct. Sem. Pl. i. 172. t. 34. f. 8. 1788) le nom de cette espèce ainsi qu’une courte description.
C’est un arbre sempervirent qui peut atteindre 20 m de haut et dont la couronne s’étend sur une largeur de 10 à 50 m. Il se caractérise de façon spécifique par l’existence à sa base de plusieurs troncs atteignant jusqu’à 2 m de diamètre et possède des branches allongées et arquées, parfois appuyées sur le sol, et/ou des racines adventices.
Ses branches sont nombreuses et recouvertes, quand elles sont jeunes, d’un duvet caduc de couleur blanc-grisâtre.
L’écorce est solide, très subéreuse, persistante, difficile à détacher, souvent fortement fissurée et a une couleur qui varie du gris au gris-marron.
Les feuilles sont coriaces, longues de 25 à 120 mm, larges de 25 à 60 mm, elliptiques, oblongues, parfois lancéolées avec un apex aigu ou obtus et de couleur vert olive. Leur côté inférieur est recouvert d’un duvet blanc. Leur côté supérieur, d’abord duveteux, devient glabre quand la feuille est arrivée à maturité.
Les inflorescences sont composées. En effet sur l’axe principal sont implantées d’autres inflorescences qui portent trois fleurs aux pédoncules solides et tomenteux. Une seule inflorescence est composée en moyenne de 14 ou 15 fleurs.
Les fleurs sont hermaphrodites et ont un involucre floral conique (l’hypanthium) auquel sont attachés le périanthe et les étamines avec l’ovaire au centre. Les étamines sont nombreuses (environ 27) et ont des filaments longs de 30 à 37 mm (20 au minimum et 40 au maximum). Elles sont de couleur rouge écarlate mais chez certains cultivars leur couleur peut être orange, rose, jaune ou blanche.
Dans les peuplements isolés en effet la dérive génétique a conduit à des variations de la couleur des fleurs. Beaucoup de plantes qui poussent autour du lac Rotorua produisent des fleurs nuancées de rose. Le cultivar “Aurea” aux fleurs jaunes est issu de plantes découvertes pour la première fois en 1940 sur l’île de Motiti dans la baie de Plenty.
La floraison dans les régions d’origine a lieu aux mois de novembre et de décembre. Les plantes cultivées dans l’hémisphère Nord fleurissent entre mai et d’août.
Suivant l’emplacement de chaque arbre, à l’ombre ou à la lumière, les périodes de floraison peuvent varier.
Le calice est formé de cinq sépales verts qui ont 5 dents, la corolle de 5 pétales rouges, oblongs et persistants. Les sépales de même que les pétales ont de petits poils sur leurs bords. L’anthèse dure environ quinze jours. Chaque fleur est fertile pendant environ 7 jours selon le cycle qui suit. La phase femelle commence avec l’arrivée à maturité du pistil et dure environ un jour et demi. Elle est suivie de la phase hermaphrodite qui dure en moyenne quatre jours, parfois plus, et au cours de laquelle le pollen est libéré depuis les anthères. Il y a ensuite une phase femelle lors de laquelle les stigmates restent réceptifs pendant au minimum neuf jours mais la pollinisation est assez rare car les pollinisateurs qui ne trouvent plus de nectar, celui-ci étant déjà épuisé, sont absents.
Dans ces conditions la pollinisation n’est possible qu’avec le pollen de la même fleur (auto-pollinisation autogame) ou celui d’une autre fleur du même individu (géiotonogamie).
Tous les ovules à l’intérieur de l’ovaire sont potentiellement fertiles mais le nombre de ceux qui forment des graines fertiles est faible (environ 10,2 %) quelle que soit la quantité de pollen disponible.
Cependant, malgré la faible viabilité des graines, leur production totale par arbre est suffisamment élevée.
Les fleurs produisent d’abondantes quantités de nectar afin d’attirer les pollinisateurs.
La fleur rouge est connue pour attirer les oiseaux qui sont plus en mesure de provoquer la formation de graines fertiles car ils favorisent la variabilité génétique du fait de leur capacité à se déplacer d’une plante à l’autre. Avec l’introduction dans les milieux néo-zélandais des abeilles mellifères on a constaté qu’elles sont plus efficaces que les abeilles autochtones en raison de leurs dimensions corporelles plus grandes qui facilitent le contact avec le stigmate.
On a observé également des visites nocturnes de geckos particuliers à la Nouvelle-Zélande et de chauves-souris à queue courte (Mystacina tuberculata Gray, 1843).
Le Rat noir ou Rat commun (Rattus rattus, Linnaeus, 1758), une espèce invasive qui compte parmi les plus nuisibles au monde, et l’oiseau passériforme Zosterops à dos gris (Zosterops lateralis, Latham, 1801) contribuent aussi pour une part au processus de la pollinisation, spécialement pour les individus de l’intérieur des terres.
Dans ses régions d’origine les fruits mûrissent aux mois de mars-avril (janvier au plus tôt et mai au plus tard).
Environ 60% des graines produites sont auto-pollinisées et dispersées par le vent. Elle sont dépourvues d’endosperme (le tissu végétal contenant les réserves utiles à la croissance de l’embryon) et leur enveloppe est mince ce qui les rend vulnérables à la dessication. Pour cette raison les graines ne peuvent subsister dans le sol que pendant une courte période et doivent trouver des conditions adéquates d’humidité afin de germer tout de suite.
En plus de fournir une source de nectar Metrosideros excelsa offre l’hospitalité aux hôtes de la forêt.
Le Cormoran varié (Phalacrocorax varius J.F. Gmelin, 1789) et les aigrettes (Egretta spp.) se perchent et nidifient souvent sur ces plantes. Les chenilles qui percent les troncs créent des sites de nidification pour des oiseaux tels que le passériforme Créadion rounoir (Philesturnus carunculatus Gmelin, 1789).
On a identifié dans les fleurs sept anthocyanes différents qui sont à l’origine de leurs couleurs. Ce sont la delphinidine-3-glucoside, la malvidine-3-glucoside, la cyanidine-3-glucoside, la petunidine-3-glucoside, la peonidine-3-glucoside, la cyanidine-3,5-diglucoside et la malvidine-3,5-diglucoside.
Les racines adventices ont également des pigments à base de cyanidine et de delphinidine qui n’existent que dans les tissus situés le plus à l’extérieur. Il est probable que la lumière stimule la production de ces pigments afin de les protéger des forts rayonnements ultra-violets de la période estivale (UVB).
Metrosideros excelsa er Metrosideros umbellata Cav. (rata) occupe une place importante dans la mythologie maorie. Il existe une légende selon laquelle le jeune guerrier Maori Tawhaki aurait tenté de trouver de l’aide au paradis pour venger la mort de son père mais il serait tombé à terre et les fleurs rouge pourpre représenteraient son sang.
Dans la mythologie maorie la plante la plus célèbre est un petit arbre de 800 ans qui est accroché à la paroi rocheuse proche du Capo Reinga, au Nord-Ouest de la péninsule de Aupouri, et dont on croit qu’il protège l’entrée de la grotte sacrée que les esprits désincarnés traversent pour se rendre dans l’au-delà.
Metrosideros excelsa a connu un grave déclin d’abord à cause des incendies provoqués par les Maoris puis par suite du déboisement du territoire effectué au XIXe siècle par les immigrés européens à la suite de l’expansion du pastoralisme.
La pression des herbivores qui ont été introduits continue à représenter une sérieuse menace pour ses peuplements qui ont été ramenées aujourd’hui à environ 10% de leur extension d’origine.
D’autre part à cause de sa propension pour l’auto-fécondation qui conduit à une augmentation de l’homozygotie, à une diminution de la variabilité génétique et à un affaiblissement de sa force (dépression inbreeding) l’extinction de cette espèce pourrait se produire dans le futur.
Pour aggraver la situation on a introduit en 1840 en Nouvelle-Zélande le Phalanger-renard (Trichosaurus vulpecula Kerr, 1792), un opossum qui constitue une véritable calamité à cause de ses multiples répercussions.
En 1989 le Forest Research Institute a procédé à une enquête sur les populations de Metrosideros excelsa sur la côte Ouest du Northland et il en est ressorti que 90% d’entre elles ont disparu.
Metrosideros excelsa est de ce fait considérée en Nouvelle-Zélande comme vulnérable et exposée à un risque élevé d’extinction à moyen terme.
Pour remédier à cette situation le Département de Conservation régional du Northland a élaboré un plan en vue du repeuplement de cette espèce et de l’espèce voisine Metrosideros umbellata.
C’est ainsi qu’a été lancé en 1990 le Project Crimson Trust, un organisme sans but lucratif qui a pour but d’aider au repeuplement et à la protection des espèces arborées de Metrosideros menacées par la voracité de l’opossum qui, en plus d’être le prédateur d’oiseaux et de petits mammifères, se nourrit de feuilles et creusent les troncs des arbres au risque de provoquer l’effondrement de leur couronne.
L’opossum est aussi le vecteur de la tuberculose bovine et représente par conséquent une importante menace pour les secteurs de l’élevage du bétail, des cerfs et de la production laitière de ce pays.
Créé à l’origine pour la protection et la régénération des deux espèces de Metrosideros le projet a été étendu en 2016 avec le programme Trees That Count à toutes les espèces d’arbres autochtones.
Cependant, malgré les efforts de la population locale pour limiter les dégâts des opossums, un autre risque menace de frapper les Metrosideros endémiques de la Nouvelle-Zélande. Il s’agit de la rouille du Myrte (Austropuccinia psidii (G. Winter) Beenken, 2017), une maladie fongique originaire de l’Amérique du Sud qui s’attaque aux espèces de la famille des Myrtaceae.
En 2017, en effet, on a relevé sa présence sur des plantes du genre Lophomyrtus dans le territoire de Aotearoa (île du Nord). Des tests expérimentaux ont démontré que cette rouille pourrait être également dangereuse pour les espèces endémiques de Metrosideros.
Sa présence pose donc un problème sérieux compte tenu de sa capacité à se propager grâce à la production de très nombreuses spores dispersées par le vent et d’autres vecteurs comme l’opossum, les oiseaux, les chauves-souris et les insectes.
Dans la médecine traditionnelle à base de plantes Metrosideros excelsa a de multiples usages. Les Maoris se servaient localement de ses feuilles pour soigner les blessures et les écorchures et de leurs extraits pour le traitement de la diarrhée, de la dysenterie et du mal de gorge.
Il a été démontré que son écorce contient de l’acide ellagique, un antioxydant naturel qui a aussi des propriétés anti-inflammatoires.
L’extrait des fleurs est hydratant, riche en antioxydants et antiseptique. Les fleurs sont également appréciées pour la production de miel.
Le bois est dense, solide et a été très utilisé autrefois pour la construction d’embarcations du fait aussi de la courbure de leurs formes naturelles.
La Nouvelle-Zélande est célèbre dans le monde entier pour les résultats exceptionnels qu’elle a obtenus dans l’horticulture tant alimentaire qu’ornementale.
C’est ainsi que l’on y a créé des cultivars et des hybrides de Metrosideros qui ont eu la faveur des amateurs et des collectionneurs qui ont été attirés par les fleurs qui contrastent avec la couleur gris argent des feuilles.
La reproduction en culture s’effectue en faisant germer ses graines qui doivent être fraîches, âgées au maximum de quelques semaines, avant donc qu’elles perdent leur viabilité, surtout si on les laisse sécher.
La reproduction par bouturage est difficile. Seulement les boutures du bois tendre en eau parviennent à s’enraciner.
La germination a lieu en général au bout de quatre à huit semaines.
Cette plante pousse bien avec un bon terreau mélangé à une importante quantité d’argile expansée.
Le sol doit conserver un taux d’humidité correct, sans rétention d’eau. Un apport de fertilisants sous la forme d’un engrais liquide comportant des micro-éléments peut être effectué toutes les deux semaines. En hiver on peut couper les longues pousses.
Dans les climats les plus froids on doit mettre ces plants à l’abri du vent et les placer à l’extérieur pendant les mois d’été.
L’activation de la floraison se produit pendant les mois les plus froids, en réponse à la réduction de la durée du jour. Toutefois les températures trop basses exercent un effet inhibiteur sur l’ouverture successive des fleurs. En effet, pour qu’elles aient une floraison abondante, ces plantes doivent être installées dans des milieux lumineux et frais à une température comprise entre 5 et 12 °C. Il est conseillé de les transférer ensuite dans un endroit chaud et exposé au soleil.
Synonymes : Metrosideros florida var. aurata J.R.Duncan & V.C.Davies; Metrosideros tomentosa A.Rich.; Nania tomentosa (A.Rich.) Kuntze.
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