Hierophis cypriensis

Famille : Colubridae


Texte © Dr. Luca Tringali

 

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Traduction en français par Michel Olivié

 

Long d'environ 1 m Hierophis cypriensis est un colubridé endémique de Chypre classé "En, endangered" dans la Liste Rouge de l'UICN des espèces menacées.

Long d’environ 1 m Hierophis cypriensis est un colubridé endémique de Chypre classé “En, endangered” dans la Liste Rouge de l’UICN des espèces menacées © Luca Tringali

Le Serpent fouet de Chypre, Hierophis cypriensis (Schätti, 1985) est un colubridé (Colubridae, Colubrinae) relativement rare et craintif qui est le seul serpent endémique de l’île de Chypre.

Le nom du genre est composé des termes grecs “hieros”, sacré et “ophis”, serpent. Dans la Grèce antique on tenait en effet les serpents pour sacrés et divins car comme ils peuvent changer de peau ils étaient considérés comme des symboles de la régénération, de la santé et de la guérison. L’origine de l’épithète latine de l’espèce qui précise la provenance géographique de ce reptile est plus évidente.

Zoogéographie

L’origine, la composition et l’évolution de l’herpétofaune cypriote ont toujours été difficiles à interpréter, surtout à cause de l’histoire géologique complexe de cette île qui proviendrait à l’origine de deux îles indépendantes qui, après avoir fusionné, ont contribué à créer son aspect actuel.

La livrée foncée de Hierophis cypriensis est traversée par des bandes claires parallèles. Le museau, plus clair, a des taches blanches typiques près des yeux et sur la tête.

Sa livrée foncée est traversée par des bandes claires parallèles. Le museau, plus clair, a des taches blanches typiques près des yeux et sur la tête © Luca Tringali

L’île est aujourd’hui dominée par deux zones montagneuses, le Troodos (au centre de Chypre) et la Kyrenia (au Nord), qui sont séparées par une grande plaine, la Mesaoria, dont le nom est issu des termes grecs “mesos”, situé au milieu et “oros”, montagne.

Cette configuration orographique expliquerait en partie l’aire actuelle de distribution de Hierophis cypriensis qui se limite aux secteurs compris entre 400 et 1900 m d’altitude du massif du Troodos et est absent de la Kyrenia que cette espèce n’a pu atteindre à cause de la vaste plaine aride de la Mesaoria.

De plus, les données des analyses moléculaires jointes à l’observation des différences morphologiques importantes de Hierophis cypriensis par rapport aux espèces apparentées Hierophis viridiflavus et Hierophis gemonensis confortent la thèse de l’isolement de Chypre du reste du continent européen pendant au moins les derniers 5,2 millions d’années, période au cours de laquelle se serait produite la spéciation.

Hierophis cypriensis est un serpent très craintif qui se nourrit d'autres serpents, de lézards, d'amphibiens, de rongeurs et d'invertébrés.

C’est un serpent très craintif qui se nourrit d’autres serpents, de lézards, d’amphibiens, de rongeurs et d’invertébrés © Luca Tringali

Écologie-Habitat

Le Serpent fouet de Chypre n’a été reconnu en tant qu’espèce distincte qu’en 1985 et a été souvent confondu auparavant avec Dolicophis jugularis, le serpent fouet noir, ce qui fait que l’on sait peu de choses sur sa niche écologique.

Les données qui ont été validées laissent supposer que ce rare endémisme est propre aux secteurs submontagnards et montagnards du centre de Chypre où se situent essentiellement les zones boisées constituées de Pinus brutia et de taillis et qui sont toujours à proximité de cours d’eau ou de réservoirs sujets le cas échéant à un asséchement estival.

Son milieu idéal se caractérise par un microclimat frais, jamais ni trop sec ni trop humide et toujours dans des secteurs où la lumière du soleil peut pénétrer, même très partiellement, à travers la dense couverture forestière.

L’absence de cours d’eau dans la chaîne de la Kyrenia contribue à expliquer, en même temps que la barrière écologique constituée par la Mesaoria, l’absence de cette espèce dans la chaîne de montagne du Nord de Chypre.

Morphophysiologie

C’est un serpent mince qui a une queue très longue et fine et dont la longueur maximale attestée est de 1,165 cm. On peut facilement l’identifier par les caractéristiques suivantes : 17 rangées longitudinales d’écailles le long de la partie centrale du corps, 124 à 132 écailles subcaudales, de petites taches claires sur les supraoculaires, les pariétales et les frontales, des écailles pré- et postoculaires claires et des lignes claires qui traversent la première moitié du corps.

On observe d’autre part une tache claire loréale, une préoculaire, deux postoculaires et huit supraoculaires dont la 4ème et la 5ème sont en contact avec les yeux et la 6ème et la 7ème ou la 7ème et la 8ème sont plus grandes.

Si le dimorphisme sexuel se limite chez cette espèce à quelques différences au niveau de la pholidosis ( nombre, forme et disposition des écailles ) et de la conformation de la queue vu que sa base est plus grande chez les mâles à cause de la présence des hémipénis Hierophis cypriensis présente un net dimorphisme ontogénétique : la livrée du dos des individus jeunes tend vers le beige alors qu’elle est rose orangé au niveau du ventre.

Au bout d’un an le dos vire au vert olive pour prendre ensuite chez les adultes deux ans et demi plus tard la couleur noire verdâtre définitive.

Éthologie-Biologie reproductive

On estime qu’il est sans doute ovipare mais on ne sait rien d’autre sur le comportement reproductif de ce reptile craintif.

Habile grimpeur Hierophis cypriensis vit entre 400 et 1900 m d'altitude et est actif aux heures les plus chaudes de la journée. On suppose qu'il est ovipare.

Habile grimpeur Hierophis cypriensis vit entre 400 et 1900 m d’altitude et est actif aux heures les plus chaudes de la journée. On suppose qu’il est ovipare © Luca Tringali

En plus d’être peut-être le serpent le plus rapide de l’île c’est un grimpeur et un nageur excellent.

Bien qu’il soit aglyphe, et donc non venimeux, il est néanmoins très agressif quand il est manipulé et tend à mordre à plusieurs reprises.

Actif surtout entre la mi-juin et la fin septembre Hierophis cypriensis a un régime alimentaire opportuniste qui est constitué d’un vaste éventail de proies : des lacertidés, d’autres serpents, des amphibiens, des rongeurs et des invertébrés.

De plus en plus menacé à cause de la perte de son habitat, du fait surtout de l’augmentation du nombre des routes asphaltées à l’intérieur des zones forestières, ce serpent est classé en tant que “EN, Endangered” dans la Liste Rouge de l’UICN des espèces menacées.

Synonymes

Coluber cypriensis Schätti, 1985; Dolichophis cypriensis Nagy et al. 2004.

 

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