Famille : Labridae
Texte © Giuseppe Mazza
Traduction en français par Michel Olivié
Le Cheilinus trilobatus (Lacépède, 1801) appartient à la classe des Actinopterygii, les poissons aux nageoires rayonnées, à l’ordre des Perciformes et à la famille multicolore des Labridae qui compte 71 genres et 549 espèces.
Le nom du genre Cheilinus vient du grec “χεῖλος” (cheilos) = lèvre, par allusion à ses mâchoires très apparentes, tandis que le nom latin de l’espèce trilobatus = qui a trois lobes évoque la forme trilobée de sa nageoire caudale.
Zoogéographie
Il occupe une aire de répartition très vaste dans les eaux tropicales du bassin Indo-Pacifique.
On le trouve, à titre d’exemple, le long de la côte africaine, de la mer Rouge à l’Afrique du Sud, y compris les îles Seychelles et la Réunion, puis côté Est aux îles Maldives, en Inde, en Thaïlande, en Malaisie, aux îles Cocos, à l’île Christmas, en Indonésie, aux Philippines, au Vietnam et plus au Nord à Taïwan et au Sud du Japon. En Océanie il est commun en Micronésie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, le long de la Grande Barrière de corail de l’Australie et en Nouvelle-Calédonie. Côté Est enfin il atteint les îles Fidji et la Polynésie française.
Écologie-Habitat
Il vit dans les formations madréporiques, souvent dans des eaux de surface jusqu’à environ 30 m de profondeur. Les juvéniles fréquentent également les récifs où les algues sont abondantes et grandissent souvent à l’abri des ramifications d’hydrozoaires urticants tels que le Corail de feu (Millepora dichotoma).
Morphophysiologie
Le Cheilinus trilobatus peut atteindre 45 cm de long. Son corps est massif. Le profil dorsal de sa tête est convexe. Son museau est relativement pointu et doté de mâchoires proéminentes armées de chaque côté de deux robustes canines. Elles lui servent à attraper les proies, à déplacer des pierres mais surtout à briser les coquilles des mollusques et les carapaces des crustacés dont il est friand.
Sa nageoire dorsale compte 9 rayons épineux et 10 rayons mous. La nageoire anale a 3 rayons épineux et 8 rayons mous. Les deux nageoires pectorales et les nageoires pelviennes sont inermes. Il est à noter que ces dernières sont particulièrement allongées, surtout chez les adultes où elles surmontent l’ouverture anale.
Chez les juvéniles la robuste nageoire caudale est arrondie, ce qui peut créer une confusion avec le Cheilinus chlorourus qui est similaire, alors que chez les adultes elle est nettement trilobée comme l’indique le nom scientifique de l’espèce.
Vu qu’il s’agit dans les deux cas de poissons hermaphrodites protogynes, c’est-à-dire chez qui les femelles peuvent en grandissant se transformer en mâles, et qu’en plus les juvéniles présentent des formes très différentes de celles des adultes il n’est pas facile de distinguer à première vue ces deux espèces et encore moins de fournir une description précise de leurs livrées qui, sous l’action des chromatophores, peuvent changer en quelques secondes suivant le milieu et l’humeur du poisson.
Si l’on met à part la forme de la nageoire caudale des adultes on peut dire que toutes les livrées possibles du Cheilinus trilobatus comportent toujours une succession rapprochée de lignes verticales ondoyantes.
Chez les juvéniles et les subadultes on note de plus la présence sur les flancs de quelques taches noires caractéristiques alignées horizontalement dans la seconde moitié du corps. Ces taches, très nettes, peuvent cependant disparaître en s’incorporant d’un coup dans de grandes zones foncées sous l’action des chromatophores.
En dehors des divisions entre zones claires et foncées fréquentes chez les deux espèces le Cheilinus chlorourus montre pour sa part une préférence pour les petites taches blanches : une série de petits points brillants présents sur le corps et les nageoires ce à quoi s’ajoute la queue qui est souvent une arabesque élégante constellée de blanc.
Chez le Cheilinus trilobatus la couleur de fond tend généralement vers le vert ou le marron, mais aussi vers le bleu turquoise, en particulier sur la tête et le menton. Il existe au départ des yeux des lignes caractéristiques rouge magenta qui se divisent pour former des séries de points sur les opercules et atteignent le bord des nageoires pelviennes et de la nageoire anale. Des veinures rougeâtres foncées se trouvent sur les rayons du lobe central de la nageoire caudale alors que souvent le lobe supérieur tend superbement vers le rouge.
Chez les adultes en particulier il existe souvent dans la zone caudale deux barres verticales blanches très nettes bordées de bandes noires. Elles apparaissent et disparaissent d’un coup suivant l’humeur du poisson. On peut observer aussi deux bandes foncées évanescentes, moins marquées, dans la partie antérieure du corps.
Éthologie-Biologie reproductive
Le Cheilinus trilobatus se nourrit de petits poissons, de mollusques, de d’échinodermes et de crustacés.
C’est une espèce qui vit en solitaire et qu’il n’est pas facile d’approcher. Des couples se forment pour la reproduction. Les oeufs, qui sont fécondés alors que les poissons sont en train de nager, sont abandonnés aux courants.
Étant donné ses dimensions et bien que sa chair ne soit pas appréciée cette espèce est parfois présente sur les marchés aux poissons locaux. Les juvéniles sont également vendus comme poissons d’aquarium multicolores mais il est évident qu’ils ne peuvent grandir que dans les grands bassins des aquariums publics.
La résilience de cette espèce est bonne, ses effectifs pouvant doubler en moins de 1,1 à 4,4 ans. Il en résulte qu’en 2020 son indice de vulnérabilité était modéré et s’établissait à 43 sur une échelle de 100.
Synonymes
Cheilinus sinuosus Quoy & Gaimard, 1824 ; Cheilinus maculosus Valenciennes, 1840 ; Cheilinus rivulatus Valenciennes, 1840 ; Cheilinus festivus Valenciennes, 1840 ; Cheilinus nebulosus Richardson, 1846 ; Cheilinus tetrazona Bleeker, 1853 ; Cheilinus fasciatopunctatus Steindachner, 1863 ; Cheilinus pulchellus Sauvage, 1880.