Famille : Canidae
Texte © Dr Davide Guadagnini
Traduction en français par Carole Jouron
Chrysocyon brachyurus Illiger, 1817, aussi connu sous le nom de Loup à crinière, est un étrange canidé longiligne appartenant à l’ordre des Carnivores (Carnivora) et à la famille des Canidés (Canidae).
Il appartient à l’espèce Chrysocyon brachyurus qui constitue l’unique espèce du genre Chrysocyon Smith, 1839.
Le nom du genre “Chrysocyon” vient du grec “χρυσός (crysos)” = or et “κύων (kyon)” = chien et signifie littéralement “chien doré”. Le nom de l’espèce “brachyurus” vient du grec “βραχύς (brachys)” = court et “οὐρά (ura)” = queue, en référence à la queue, relativement courte, de cet animal.
Zoogéographie
Le Loup à crinière est le plus gros canidé d’Amérique du Sud. Il est largement répandu dans le centre et le sud-est du Brésil et il occupe une partie du Paraguay, de l’est de la Bolivie et du nord de l’Argentine.
Écologie-Habitat
Son habitat typique est celui des savanes ouvertes et des prairies, même si elles sont partiellement couvertes de buissons et d’arbres épars. Au Paraguay, il vit également en bordure des forêts et à proximité des marais et des rivières.
Morphophysiologie
Le Loup à crinière a une silhouette haute, anguleuse, élancée et semble presque monté sur des échasses, en raison de ses longues pattes (c’est le canidé sauvage le plus haut) et de ses mouvements.
Il a une longueur d’environ 100 à 125 cm pour une hauteur au garrot de 85 à 107 cm et un poids d’environ 18 à 34 kg. Le Loup à crinière a une fourrure douce et ondoyante avec des poils assez longs, de couleur rouge-jaune-jaunâtre-brun plus dorée sur les côtés, avec des parties noires localisées sur les pattes (parties médio-distales), le menton, en une tache noire bien visible à la base du cou (sous la jugulaire blanche) et une ligne centrale sur le dos.
Le poil long, clairsemé et noir, présent sur le dos (surtout au niveau du garrot), est très visible, à tel point qu’il a valu à l’espèce le nom de Loup à crinière.
La crinière et les poils longs, le long de toute la partie dorsale du corps jusqu’à la queue incluse, peuvent se dresser de façon bien visible, ce qui indique l’état d’esprit de l’animal. Le poil dressé, l’animal paraît plus grand, ce qui s’avère utile s’il se sent menacé. La queue est assez courte, environ 25 à 45 cm de long, et se termine par une touffe blanche.
La jugulaire (sorte de large bavette pectorale) présente une très large tache blanche. Les dents sont en nombre régulier, selon le modèle des canidés, mais les molaires, peu pointues et plutôt larges, présentent une adaptation particulière à un régime intégrant des végétaux.
Les oreilles sont très grandes, recouvertes à l’intérieur de poils blanchâtres, et le long museau est fin et de couleur sombre. Les yeux ne sont pas très grands avec un iris brun qui leur donne un air triste. L’apparence de la tête, combinée à la robe majoritairement fauve, lui donne l’apparence d’un renard long et haut (Vulpes vulpes).
En fait, le Loup à crinière, tant du point de vue comportemental que physiologique, est plus proche du renard (même s’il appartient à un genre complètement différent) que du loup (Canis lupus). Des études génétiques récentes montrent que le Loup à crinière n’est pas étroitement lié à d’autres canidés vivants ; il représenterait une espèce archaïque survivante de grands mammifères sud-américains du Pléistocène aujourd’hui disparus.
Éthologie-Biologie reproductive
Les adaptations si particulières du Loup à crinière à l’environnement ouvert de la savane où il vit en font une espèce peu menacée et relativement peu perturbée dans la niche écologique bien isolée qu’elle occupe.
Les loups à crinière vivent parfois en couple, surtout pendant l’éducation des jeunes, mais aussi de manière isolée à d’autres moments.
Ils explorent le territoire dans lequel ils vivent, à la recherche de proies généralement de petite et moyenne taille ; leurs longues pattes facilitant leurs déplacements entre les herbes très hautes de leur habitat.
Dans la plupart des cas, les proies sont constituées de lapins, cochons d’Inde sauvages et autres petits mammifères, lézards, oiseaux, œufs, arthropodes, poissons.
Parmi les aliments d’origine végétale, le Loup à crinière consomme fruits, baies, tubercules, fruits du palmier (Copernicia australis) et tomates sauvages (Solanum lycocarpum). La tomate sauvage, aussi appelée “fruit du loup”, a des propriétés curatives pour le Loup à crinière (elle soignerait les problèmes rénaux). La plante est activement disséminée grâce aux excréments dispersés dans l’environnement par l’animal lui-même. Selon certaines études, les végétaux peuvent représenter jusqu’à près de 50 % de son régime alimentaire.
Le Loup à crinière ne vivant pas en bande, sa technique de chasse est très différente de celles des loups et des lycaons, mais elle ne ressemble pas non plus aux recherches prudentes du renard. Le loup à crinière se déplace lentement parmi les hautes herbes de la prairie et, dès qu’il repère une proie potentielle, l’attrape d’un seul coup (bond soudain), la secoue vigoureusement pour l’étourdir et la mange rapidement en quelques bouchées.
Il a principalement des habitudes crépusculaires et nocturnes.
Le Loup à crinière possède une démarche très caractéristique. Lorsqu’il marche, il soulève simultanément les deux pattes du même côté, déplaçant son poids sur les deux autres appuis.
Il en résulte un pas ondulant qui se transmet au reste du corps et qui rappelle, dans une moindre mesure, l’amble des girafes (Giraffa camelopardalis).
Il peut cependant être très rapide sur de courtes distances, lorsqu’il court.
Lors de la course, les pattes arrière sont propulsées devant les antérieures, ce qui permet d’effectuer de grands sauts. Comme ses pattes postérieures sont plus fortes et plus longues que ses pattes antérieures, le Loup à crinière est aussi capable de franchir des obstacles considérables en un seul saut.
Il ne peut cependant pas courir pendant de longues périodes. Comme sa technique de chasse n’est pas basée sur la poursuite de la proie mais sur sa découverte, sa surprise et sa capture par sauts et qu’il n’a pas d’ennemis naturels de nature à l’inquiéter, cette espèce n’a pas développé une grande endurance à la course.
Pour cette raison, le Loup à crinière est une victime facile pour les chasseurs à cheval, qui le traquent dans les grands espaces ouverts des prairies. Le Loup à crinière ne s’attaque pas à l’homme, et même s’il est très timide, il ne semble pas non plus en avoir particulièrement peur.
En cas de rencontre fortuite entre l’animal et l’homme, on n’observe généralement pas une fuite précipitée mais plutôt un comportement où l’intrus est tenu à l’écart et ignoré.
Le Loup à crinière dégage une odeur piquante et désagréable, très caractéristique. Au zoo, par exemple, elle est très facile à percevoir lorsqu’on approche de son enclos. C’est principalement l’urine, utilisée pour marquer le territoire, qui porte cette odeur caractéristique de l’espèce. Les couples peuvent défendre des territoires de plusieurs dizaines de kilomètres, traversés par des sentiers tracés par les animaux eux-mêmes. En dehors de la période de reproduction, on peut trouver d’autres spécimens sur les mêmes territoires de chasse si ces derniers présentent une abondance de proies. La gestation dure un peu plus de deux mois (65 à 68 jours) et la portée est généralement composée de 2 à 6 petits.
Quand ils sont encore jeunes, les petits ont une fourrure uniforme de couleur noirâtre. Ils sont pris en charge par leurs parents pendant environ un an. En captivité, bien que distants et méfiants, il arrive que les loups à crinière acceptent de la nourriture de la main de leurs soigneurs. Cette espèce a malheureusement un ennemi de taille : “l’homme”. En effet, elle fait l’objet d’une impitoyable chasse organisée, car on la tient pour responsable d’attaques contre les animaux domestiques.
Les éventuelles proies domestiques du Loup à crinière sont principalement des volailles. Il est clair que cette espèce est en train de connaître un spectaculaire déclin en nombre. Mais il ne suffit pas de promulguer des lois de protection, inefficaces dans la pratique. Les campagnes d’information et de sensibilisation, notamment auprès des populations locales, mettent en évidence la véritable et infime incidence du Loup à crinière sur le bétail, démontrent son absence de dangerosité et la douceur de son comportement et soulignent son utilité pour circonscrire les populations de rongeurs.
Il est donc important de multiplier ces campagnes d’information et de prévention. L’espèce est bien présente dans les parcs zoologiques, qui ont toujours inclus cet étrange animal dans leurs collections. Ces ambassadeurs de leur espèce dans le monde, sont maintenant élevés en captivité avec succès. Le Loup à crinière peut avoir une longévité de 13 à 16 ans.
Synonymes
Canis brachyurus, Canis campestris, Canis isodactylus, Canis jubatus, Vulpes cancrosa.