Famille : Cracidae
Texte © Dr Davide Guadagnini
Traduction en français par Catherine Collin
Le Hocco de Daubenton (Crax daubentoni G.R. Gray, 1867) est un grand oiseau appartenant à l’ordre des Galliformes (Galliformes), à la famille des Cracidés (Cracidae), au genre Crax et à l’espèce Crax daubentoni. L’espèce est monotypique et distincte des autres espèces appartenant au genre Crax principalement par l’aspect particulier de la femelle.
Le nom de genre “crax” vient d’un mot grec peu précis qui, bien qu’ayant une étymologie incertaine, pourrait signifier aussi bien “crête” que “hurleur”, caractéristiques correspondant toutes deux à ces galliformes dotés d’une crête de plumes érectiles et dont les vocalises sont de forts sifflements.
Le nom d’espèce dérive du naturaliste et médecin français Louis Jean-Marie D’Aubenton (1716-1799) auquel cet oiseau a été dédié.
Zoogéographie
L’espèce est originaire et localisée dans une aire géographique du nord du Venezuela et, de façon contiguë, dans la Colombie voisine. Au Venezuela elle est présente à l’est sur la péninsule de Paria mais est absente au sud de l’Orénoque. Plus à l’ouest elle est présente vers le Rio Arauca et à la frontière Venezuela-Colombie où elle a été trouvée sur Isla de Charo. L’espèce est aussi présente dans les montagnes à l’extrême nord-est de la Colombie près de la frontière avec le Venezuela ; au sud-est de Norte De Santander et dans la province nord-ouest d’Arauca. Au nord on la trouve aux pied de la sierra di Perija, jusqu’à pratiquement rejoindre les Caraïbes où elle est connue dans les monts de Oca au sud de Carriapia et dans la Sierra Negra et à l’est de Fonseca. Son aire est séparée au pied de la chaîne de Santa Marta, où vit Crax alberti, par une étroite bande de terrain qui peut-être n’est pas adapté à son installation.
Même si on retrouve ce hocco aux pieds des montagnes et dans d’autres milieux différents, il est, comme les autres Hoccos, un oiseau des aires tropicales.
Ecologie-Habitat
Le plus grand nombre d’individus se trouve dans les forêts galeries de son aire où il est, ou était, abondant. Dans le reste du territoire, étant une espèce plutôt exigeante, sa distribution est localisée. Il est également présent sur les pentes des montagnes et dans les campagnes alternées avec des forêts. Il fréquente les bois secs avec une végétation caduque, souvent à proximité de fleuves ou rivières dans de petites vallées où un taux d’humidité plus fort par rapport aux zones environnantes favorise la croissance d’une forêt correspondant aux besoins de l’espèce. Dans les milieux larges, plats et marécageux des grands territoires des Llanos, durant la saison sèche, les hoccos de Daubenton se réunissent à proximité des cours d’eau résiduels et des puits d’eau qui résistent à la sécheresse. Des réunions de 50, 100, voire plus, individus ont été vues, mais des groupes aussi importants n’existent plus que dans le souvenir, car ils ont disparu à cause de l’installation de l’homme dans ces aires géographiques. Les hoccos de Daubenton fréquentent des altitudes entre 100 et 500 m au Venezuela et entre 500 et 1 500 m en Colombie. L’espèce est absente des forêts de montagne où est présent le Hocco à pierre (Pauxi pauxi) et des forêts pluviales de plaines où vit la Pénélope panachée (Penelope purpurascens), elle n’apprécie pas non plus les zones buissonnantes excessivement sèches.
Morpho-physiologie
Un important dimorphisme sexuel se remarque chez cette espèce, le poids variant de 1 625 à 3 200 g. Le mâle a une livrée principalement noire ayant un aspect un peu brillant avec des reflets vert-bleu très foncés surtout sur les parties dorsales. Le ventre, les touffes de plumes à l’arrière des cuisses et les pointes des rectrices externes sont blancs. Il possède une large crête de plumes, érectile. Les plumes de la huppe sont, comme chez d’autres espèces de hoccos caractéristiquement torsadées et frisées pour former cette crête-huppe particulière. Le bec noir, est grand, massif et robuste. Il possède des barbillons modestes jaune brillant comme l’imposante caroncule sphérique qui surmonte le bec. La peau jaune recouvre aussi la base du bec jusqu’à sa moitié. Les hoccos mâles ont un iris marron très foncé, les pattes sont ardoise-corne avec des tarses longs de 93-113 mm.
La femelle qui est elle aussi principalement sombre, ressemble plus à son mâle que d’autres espèces de hoccos chez lesquelles les femelles se distinguent en majorité de leurs mâles. Comme nous le disions, elle aussi a une livrée sombre mais avec les parties du dessous barrées de blanc, sauf le ventre qui est blanc comme chez le mâle. Les rayures sont larges d’environ 1/8ème de centimètre et il y en a deux par plume, distantes de la moitié d’un centimètre entre elles. La crête, présente également chez la femelle est modérément barrée de blanc et ce blanc est souvent limité à la partie basale de la crête elle-même, et visible uniquement quand les plumes de la huppe sont bien séparées (quand la huppe érigée est ouverte). Les femelles ont une cire et une face noirâtre avec un œil à l’iris blanchâtre-brun-clair brillant (toujours plus clair que celui du mâle). L’aile est longue de 385-410 mm chez le mâle et de 356-390 chez la femelle. La queue mesure 325-370 mm pour le mâle et 306-360 pour la femelle.Ethologie-Biologie reproductive
Il se nourrit aussi bien au sol que sur les arbres en petits groupes familiaux (3-4 individus) ou bien, durant la saison sèche, en groupes plus importants comprenant au maximum une quinzaine d’oiseaux. La nourriture comprend des végétaux de types variés comme des graines, des feuilles, des fruits ainsi que des petits animaux. Il se reproduit en juin dans les Llanos vénézuélien et la nidification commence donc avec l’arrivée des pluies.
Chez cette espèce le mâle, à la saison des amours, émet un chant qui est un sifflement prolongé et aigu semblable à celui émis par le Hocco globuleux (Crax globulosa). Le sifflement est émis avec le bec ouvert. Selon certains chercheurs, lors de la période de reproduction, la trachée du mâle subit de légères modifications physiologiques gonflant et devenant plus courbe. Il semble que les mâles soient territoriaux puisque, dans la nature, on les a entendus émettre leurs sifflements plus ou moins toujours de la même zone. Leurs sifflements, quand il se superposent à celui d’autres individus proches, devient une sorte de sifflement lugubre et prolongé qui, s’il est émis par 8-10 individus en même temps, a un effet très particulier et bien connu des indigènes qui nomment ces oiseaux “Porù”.
Certains auteurs ont émis l’hypothèse que cette espèce puisse être polygame, avec le mâle qui s’accouplerait avec plus d’une femelle, mais considérée la monogamie documentée et certifiée pour les autres espèces semblables de hoccos, cette affirmation est mise en doute. Il n’est pas facile de voir cet oiseau au sol. Quand ils se posent sur les branches des arbres ils chantent souvent et soulèvent les plumes de leur queue les ouvrant comme des éventails exposant ainsi les plumes blanches du dessous de la queue et devenant ainsi plus visibles aux yeux d’un éventuel observateur. Si on les dérange, ils émettent un sifflement en général plus fort, net et bref par rapport à leur habituel sifflement lent et plaintif.
Le nid est bâti sur les arbres ou au sol et construit avec un amas de brindilles et d’autres matériaux d’origine végétale. Deux gros œufs sont pondus par couvée, incubés pendant environ 30-32 jours par la femelle. Les poussins à la naissance sont nidifuges et déjà capables d’accomplir de petits vols puisqu’ils possèdent déjà des rémiges. Ils peuvent donc se percher dès leurs premiers jours sur des branches en hauteur. Leur duvet cryptique est strié et tacheté de brun-marron-noir-jaunâtre. Les parents donnent la nourriture aux petits directement de leurs becs aux leurs ; les nouveau-nés sont, dès leur premiers jours, en mesure de rechercher activement à manger. Les premières plumes des jeunes sont brunes. Les juvéniles, mesurant ¼ de la taille des adultes, présentent déjà la livrée qui permet de distinguer les mâles des femelles et ont la crête déjà bien développée. Ils semblent des adultes en miniature. Le plumage des juvéniles est moucheté et bordé de marron. En captivité, cette espèce est surtout présente dans ses lieux d’origine et a toujours été plutôt rare dans les zoos et les élevages européens ou américains.
Quand il est élevé en dehors de son climat tropical d’origine, le Hocco de Daubenton, se montre très sensible au froid par rapport à d’autres espèces similaires. Cette espèce était commune dans les Llanos et dans d’autres aires mais elle a subit un important déclin dû à la conversion de nombreux territoires en rizières. L’espèce est protégée dans quelques fermes d’élevage et dans quelques aires naturelles.
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