Famille : Lamprophiidae
Texte © Dr. Nicolò Pellecchia
Traduction en français par Michel Olivié
La Couleuvre de Montpellier ou Couleuvre lacertine, Malpolon monspessulanus (Hermann, 1804) est un reptile ophidien appartenant à l’ordre des Squamata et à la famille des Lamprophiidae qui comprend environ 90 espèces répandues essentiellement en Afrique.
C’est une famille de serpents très diversifiée où il est possible d’observer différents types d’adaptations depuis des serpents fouisseurs à des serpents semi-aquatiques qui vivent dans de nombreuses typologies de milieux tels que des montagnes, des déserts, des forêts tropicales ou autres.
L’étymologie du nom du genre Malpolon n’est pas du tout claire mais il est cependant possible de formuler au moins deux hypothèses.
La première consiste à faire remonter son origine à un mot d’un dialecte des Tamouls, un peuple du Sri Lanka, où il désignerait une espèce de serpent.
Le nom de Malpolon aurait été employé pour la première fois par deux naturalistes du XVIIe siècle, John Ray et Albertus Seba, avant l’introduction de la nomenclature binôme instituée par Linné et a ensuite été adopté par Fitzinger en 1826 pour décrire ce genre.
La seconde hypothèse fait dériver le nom de ce genre du latin “malus”, mauvais, et du grec “polos”, axe, poteau, soit par conséquent mauvais poteau en référence à la posture dressée adoptée par ce serpent pour inspecter le milieu environnant et à son caractère agressif.
L’épithète de l’espèce monspessulanus vient du latin et se rapporte à la ville de Montpellier qui fut le lieu de provenance du spécimen décrit par Hermann.
Le genre Malpolon compte actuellement trois espèces : le Serpent oriental de Montpellier ou Couleuvre maillée (Malpolon insignitus), le Faux cobra (Malpolon moilensis) et la Couleuvre lacertine (Malpolon monspessulanus).
Zoogéographie
L’aire de répartition de Malpolon monspessulanus comprend au Nord la partie Ouest de la Ligurie et le Sud-Est de la France pour ensuite descendre le long de la péninsule ibérique jusqu’au Maroc et au Nord-Ouest de l’Algérie.
Écologie-Habitat
C’est une espèce qui fréquente une vaste gamme d’altitudes entre le niveau de la mer et 2160 m. Elle préfère les terrains secs et rocheux mais elle s’adapte bien à différents milieux de type méditerranéen. Il n’est pas rare de l’observer aussi dans des zones anthropisées ou cultivées telles que des terrasses plantées de vignes ou d’oliviers.
Sa période d’activité se situe principalement entre avril et novembre. Les pics les plus élevés s’observent en général en mai et septembre.
C’est un serpent spécifiquement diurne mais pendant les mois les plus chauds son activité tend à devenir crépusculaire et nocturne.
C’est un prédateur agile et rapide. Il pratique différentes méthodes de chasse comme l’affût, la poursuite ou la recherche active de la proie.
Pour tuer sa proie il utilise son venin dont l’action est lente et s’étale sur 24 à 48 heures.
Son alimentation se compose principalement d’autres reptiles, surtout des lézards, mais aussi de geckos, de chalcides, d’orvets ou d’autres serpents. En plus de ces proies la couleuvre de Montpellier se nourrit de petits mammifères et d’oiseaux.
Parmi les principaux prédateurs de cette espèce on trouve différents mammifères, tels que le renard ou les sangliers, et les rapaces.
Morphophysiologie
C’est un serpent de grandes dimensions à la forme allongée et musculeuse.
Les mâles qui peuvent atteindre 181 cm sont plus grands que les femelles qui parviennent à une taille de 108 cm. Dans des cas exceptionnels certains individus dépassent les 2 mètres et atteignent 250 cm.
Sa couleur est variable. Parmi les serpents paléarctiques c’est le serpent qui présente le dimorphisme sexuel le plus grand.
Les femelles et les juvéniles ont une couleur brun grisâtre à laquelle se mêlent en alternance des taches plus ou moins foncées qui ont aussi parfois des teintes rougeâtres.
À l’âge adulte les mâles prennent une couleur qui peut varier du gris au vert olivâtre ou brunâtre. Chez les deux sexes, mais plus spécifiquement chez les mâles, on note la présence d’une tache en forme de selle située sur le cou et de couleur foncée.
Un autre signe de dimorphisme sexuel concerne le ventre dont la couleur de fond est blanc-jaunâtre mais qui est beaucoup plus tacheté chez les femelles que chez les mâles.
La couleur des femelles est plus nette déjà quand elles sont jeunes ce qui permet donc d’identifier le sexe avant même que les individus aient atteint leur maturité sexuelle.
La couleuvre de Montpellier a deux grands yeux à la pupille ronde sur lesquels se trouvent des écailles céphaliques très saillantes qui semblent former un sourcil.
Les écailles sur le dos comportent une rainure et sont disposées sur 19 rangées.
C’est un serpent opisthoglyphe, ses crochets venimeux étant en effet placés dans la partie des mâchoires située le plus en arrière.
Ces crochets sont cannelés pour pouvoir canaliser le venin lors de la morsure.
Étant donné la disposition de leurs crochets les serpents opisthoglyphes ont du mal à empoisonner des proies de grandes dimensions ce qui est la raison pour laquelle ils ne sont pas en général considérés comme dangereux pour l’homme. Par contre avec des proies de petites dimensions il réussissent à efficaces en parvenant à les porter tout de suite dans la partie arrière de la bouche.
Éthologie-Biologie reproductive
Malpolon monspessulanus est une espèce ovipare. La saison des amours débute habituellement en avril et se termine en juin.
Durant cette période les mâles recherchent activement les femelles et se battent avec leurs congénères.
Les femelles pondent de 4 à 18 œufs suivant leur taille dans des lieux humides et ensoleillés tels que des troncs, la litière ou de grands rochers. Dans quelques rares cas on a observé des œufs et des juvéniles réunis dans des groupes importants ce qui indique un mode de nidification en colonie.
Il semblerait d’après certaines observations que les mâles de la couleuvre de Montpellier marquent leur territoire au moyen de signaux chimiques dans le but d’empêcher d’autres mâles de s’approcher de leurs partenaires. Les mâles qui pénètrent dans le territoire d’un couple sont mordus ou bien se livrent à des combats ritualisés. On a remarqué d’autre part que les perdants peuvent rester sur place en faisant alors fonction d’auxiliaires du mâle dominant et en défendant le territoire quand celui-ci est absent.
C’est un serpent très vigilant qui adopte une posture d’affût pour scruter les alentours. De temps en temps il dresse son corps et se met à remuer la tête de tous les côtés afin de repérer d’éventuels prédateurs aux aguets.
Dès qu’il perçoit la présence d’un prédateur il s’enfuit très rapidement. Sil ne parvient pas à s’échapper il essaie de menacer le prédateur en se dressant tout en produisant un fort sifflement, en gonflant sa tête et en comprimant la zone de son cou.
La couleuvre de Montpellier est une espèce assez répandue dans toute son aire de répartition et ses effectifs sont stables. Les principales menaces qui pèsent sur ces serpents sont liées à l’homme comme les routes ou les puits abandonnés dans lesquels ils tombent, ce qui est très fréquent surtout au Maroc.
Malpolon monspessulanus figure en tant que (LC, Least Concern), c’est-à-dire “Préoccupation mineure” dans la Liste Rouge de l’UICN des espèces menacées.
Synonymes
Coluber monspessulanus Hermann, 1804; Natrix lacertina Wagler, 1824; Coluber rupestris Risso, 1826; Rhabdodon fuscus Fleischmann, 1831; Psammophis lacertina Schlegel, 1837; Coelopeltis lacertina Eichwald, 1841; Coluber monspeliensis Gervais, 1848; Caelopeltis lacertina Boettger, 1876; Caelopeltis lacertina Boettger, 1879; Coelopeltis monspessulana neumayeri Boettger, 1889; Coelopeltis lacertina Boulenger, 1887; Coelopeltis monspessulanus Boulenger 1896; Malpolon monspessulanus Mertens & Müller, 1928.
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