Famille : Bovidae
Texte © Dr. Gianni Olivo
Traduction en français par Michel Olivié
Parfois confondu avec l’Oryx algazelle ou Oryx aux cornes en forme de cimeterre (Oryx dammah) le célèbre Oryx d’Arabie ou Oryx blanc (Oryx leucoryx Pallas, 1766, famille des Bovidae) a des dimensions nettement inférieures à celles des autres espèces d’oryx (un poids de 60 kg en moyenne pour une hauteur au garrot de 90 à 100 cm). C’est par contre une espèce distincte.
Le nom scientifique oryx vient du grec ancien et veut dire antilope tandis que le second nom signifie, également en grec ancien, antilope blanche.
Autrefois beaucoup plus répandu dans toute la péninsule arabique et au Nord jusqu’au Koweït et à l’Irak il est aujourd’hui confiné dans des zones spécifiques comme par exemple l’aire protégée de Mahazat-as-Sayd dans la partie Ouest de l’Arabie saoudite qui couvre une surface de presque 3000 km2, l’Uruk Bani Ma’arid Reserve qui atteint 12000 km2, l’Arabian Oryx Sanctuary dans le sultanat d’Oman, l’Arabian Oryx Reserve dans les environs d’Abou Dabi et la zone protégée du Wadi Rum en Jordanie. Il existe en Israël des zones où il est également présent, à savoir au moins trois sites situés dans le désert du Neguev et dans le Nord de l’Arava.
Au total il semble, en excluant d’autres populations en semi-captivité ou vivant dans des parcs zoologiques, que les individus à l’état sauvage soient au nombre d’environ 1200. C’est donc à l’évidence une espèce qui doit être protégée et surveillée avec soin. Certains rapports cependant font état d’une augmentation des effectifs lente mais constante que ce soit en Israël ou en Arabie saoudite. Cette espèce ne serait donc plus à compter parmi les animaux véritablement en péril ou menacés mais plutôt dans la catégorie D1, c’est-à-dire celle des “espèces vulnérables”.
Avant les années 20 du siècle dernier il existait deux zones de répartition de cette antilope qui étaient séparées par plus de 1000 km de “vide”. Une population au Nord, plus réduite, et une population au Sud, plus nombreuse, concentrée surtout aux alentours du Rub al-Khali et des plaines arides du centre et du Sud d’Oman. Dans les années 50 l’Oryx d’Arabie a disparu de la zone Nord et dans la zone Sud son nombre a fortement baissé mais il tend à présent à reconstituer ses effectifs grâce aux mesures qui ont été adoptées.
En conclusion on peut dire que les pays où l’Oryx d’Arabie a disparu sont l’Égypte, l’Irak, le Koweït, la Syrie, le Yémen alors qu’il est présent en Arabie saoudite, en Israël, en Jordanie, dans les Émirats arabes unis (Abou Dabi), dans le sultanat d’Oman et à Bahreïn. Vu qu’il existe au minimum 1200 animaux en liberté auxquels on peut ajouter facilement au moins 6000 individus en semi-captivité dans des parties du monde très diverses on peut avoir une certaine confiance quant à l’avenir de cette espèce qui se trouvait autrefois dans une situation critique aussi et surtout à cause de son habitat extrêmement ouvert, dépourvu d’abris et de couverture naturelle, et aride au point d’obliger des animaux pourtant parfaitement adaptés au désert à vivre dans des zones définies bien spécifiques qui imposent certaines limites à ses possibilités de déplacement.
La conformation de cet oryx n’est pas foncièrement différente de celle des autres espèces, si l’on excepte ses dimensions. C’est un animal robuste qui a un corps “massif”, rectangulaire et dont le tracé du dos est rectiligne et horizontal. Le cou est également épais et musculeux, la tête relativement allongée et les oreilles peu développées en comparaison surtout d’autres antilopes de taille similaire. La couleur de la robe est blanche, comme l’indique un de ses noms, parfois d’un blanc pur, d’autres fois crème et contraste vivement avec la couleur noire des pattes.
Au point de passage entre le blanc du corps et le noir des membres il existe souvent une zone rougeâtre ou marron clair qui, à l’arrière, recouvre presque entièrement la cuisse alors que chez les membres antérieurs elle est habituellement plus réduite mais peut s’étendre à la partie inférieure de la gorge. Cette caractéristique n’est toutefois pas toujours présente et il y a des individus où le contraste entre le blanc et le noir est très net. Le museau porte un masque constitué d’une tache triangulaire dont l’extrémité supérieure se situe sur le dessus du museau et d’une bande noire latérale qui part de la région de l’oeil. Il y a en plus, à la base des cornes, une autre tache foncée triangulaire. Les “pieds” sont souvent blancs comme si l’animal portait deux paires de guêtres.
Les cornes, qui existent chez les deux sexes, sont semblables à celles des autres espèces d’oryx, longues et fines, légèrement recourbées vers l’arrière mais beaucoup moins que chez l’Oryx à cornes en forme de cimeterre. Leur longueur ne dépasse pas en général 70 à 75 cm.
Très spécialisé dans l’adaptation aux conditions de vie dans le désert (voir les fiches des autres espèces d’oryx) l’Oryx d’Arabie est également aidé en cela par la couleur de sa robe qui n’absorbe pas les rayons du soleil mais tend à les réfléchir. Comme chez les autres espèces la transpiration, grâce au procédé du “halètement nasal”, ne commence que lorsque la température du corps passe de 36 à 45 °C. D’autre part l’eau présente dans les déjections est réabsorbée et utilisée, ce qui fait que les excréments sont pratiquement lyophilisés même quand ils viennent à peine d’être évacués. Les urines sont concentrées au maximum ce qui leur confère une couleur foncée. Enfin l’animal tire à son avantage le meilleur parti de toutes les astuces visant à réduire l’absorption de chaleur et la déshydratation en restant peu exposé au soleil pendant les heures les plus chaudes qu’il passe à l’ombre d’un rocher, en se déplaçant et en pâturant parfois la nuit, etc…
Il semble prouvé, bien que les mécanismes demeurent inconnus, que cet oryx, plus que les autres espèces, soit doté d’une sorte de station météo car il a la propriété de prévoir et de localiser les zones où surviennent ou se sont produites des précipitations et de s’y diriger ensuite avec une précision de GPS en effectuant de très longs déplacements en parfaite synchronisation avec les conditions atmosphériques.
L’Oryx d’Arabie forme souvent des groupes comprenant de 2 à 15 ou 20 têtes mais on a rapporté l’existence de concentrations d’une centaine d’individus. Je crois cependant que de telles situations sont à mettre au compte de conditions environnementales particulièrement favorables qui attirent différents groupes dans la même zone.
Bien qu’étant un “grazer”, c’est-à-dire un brouteur qui se contente même d’herbes desséchées et coriaces ce n’est assurément pas un “grazer” exclusif. En effet, comme il doit tirer profit de toutes les protéines disponibles et de l’humidité qu’il peut éventuellement extraire de sa nourriture, il passe volontiers et sans aucune gène au “browsing” en arrachant des feuilles, des pousses ou des baies de branches de buissons ou de plantes basses. Il déterre également des bulbes et des racines. Le fait qu’il soit un “sorcier de la pluie” lui permet en effet non seulement de repérer la présence de l’eau mais aussi celle des herbes tendres et riches en liquides qui poussent rapidement après une averse même sur des terrains très arides.
Des recherches menées dans l’Oman ont démontré qu’il a une nette prédilection pour la Scoparia ou Stipagostris, une herbe qui pousse sous forme de touffes dans des zones désertiques et qui est riche en protéines, surtout quand elle est en fleur.
En ce qui concerne les rapports hiérarchiques et les postures de domination et de soumission il convient de se référer à la fiche de l’Oryx gazella beisa. La possession d’armes létales comme les cornes en forme d’épée des oryx fait que les rapports à l’intérieur de ces espèces s’effectuent avec une certaine prudence et avec des comportements souvent très ritualisés de façon à réduire les risques d’affrontements sanglants.
Noms communs : Arabian ou White oryx (anglais), Orice d’Arabia ou Orice bianco (italien), Oryx de Arabia (espagnol),Boosolah, Baqar al Wash, Maha, Wudhaihii (noms arabes).