Famille : Synodontidae
Texte © Giuseppe Mazza
Traduction en français par Michel Olivié
Synodus intermedius (Spix & Agassiz, 1829) est un poisson appartenant à la classe des Actinopterygii, les poissons aux nageoires rayonnées, à l’ordre des Aulopiformes et à la famille des Synodontidae, celle des poissons que l’on appelle les poissons-lézards, un groupe apparu au Miocène qui compte 4 genres et 81 espèces.
À le voir avec ses mâchoires allongées, ses petits yeux faisant saillie sur les côtés et son corps long et effilé qui s’amincit vers le pédoncule il fait en effet penser à un saurien, d’où son nom commun en français de “Anoli de sable”, c’est-à-dire Anolis du sable, par référence à ce parent des iguanes très répandu dans l’Amérique tropicale et au fait qu’il a coutume de se cacher jusqu’au cou dans le sable pour échapper aux prédateurs et surprendre ses proies.
Mais Synodus intermedius est connu également sous les noms de Poisson-lézard rayé de jaune, de Mabouya à raies jaunes, de poisson-lézard des Caraïbes et de Plongeur du sable.
Le nom du genre Synodus vient du grec “syn”, ensemble, et “odous “, dent, par référence à ses nombreuses petites dents qui poussent très près les unes des autres.
Le nom de l’espèce intermedius dont l’auteur n’a pas donné l’explication dans sa description de cette espèce pourrait se rapporter au motif de sa livrée qui comporte des losanges intercalés avec des taches ou peut-être au fait que cette espèce possède des caractéristiques intermédiaires avec celles de deux autres espèces.
En effet il ressemble par exemple à Synodus saurus (Linnaeus, 1758) qui n’a toutefois pas la caractéristique tache noire et rectangulaire à l’extrémité supérieure de la fente branchiale et à Synodus synodus (Linnaeus,1758) qui a pour sa part une tache noire sur le museau, un rayon de moins sur la nageoire anale et une livrée plus rouge avec de larges bandes verticales foncées.
Zoogéographie
Synodus intermedius a une très grande aire de distribution.
Depuis les Caraïbes il rejoint les rivages du Canada au Nord et l’Uruguay au Sud. Puis, côté Est, après l’archipel de Trindade et Martim Vaz, on le trouve au milieu de l’océan aux îles de l’Ascension et de Sainte-Hélène et enfin à Sao Tomé et Principe, au Cap Vert, aux Canaries et à Madère sur l’autre rive de l’Atlantique.
Écologie-Habitat
Synodus intermedius est une espèce démersale, c’est-à-dire qui vit près du fond marin.
On peut le trouver dans des milieux sablonneux jusqu’à 300 m mais aussi dans les eaux peu profondes des récifs, parfois dans les passages sableux créés par les courants ou placé bien en vue sur un madrépore en position dominante où, posé sur ses grandes nageoires pelviennes étalées, il regarde autour de lui, immobile et mimétique en tendant des embuscades aux poissons de passage.
Morphophysiologie
Synodus intermedius peut atteindre 1,5 m de long mais sa taille moyenne se situe autour de 25 cm.
Son museau est court. Sa tête est plate et triangulaire vue du haut. Sa bouche est pleine de petites dents en forme d’aiguille qui sont disposées sur deux rangées à la mâchoire supérieure et trois sur la mâchoire inférieure. Dans l’un et l’autre cas elle sont plus courtes sur la rangée extérieure. Et comme si cela ne suffisait pas il a 3 ou 4 rangées de dents sur le palais et 5 sur la langue.
Les nageoires, par contre, n’ont pas de rayons épineux. La dorsale a 11 ou 12 rayons mous, les pectorales 11 à 13, l’anale 11 et les pelviennes 8. La nageoire caudale est falciforme comme il convient pour un poisson qui peut se déplacer en effectuant des ondulations rapides et si vives qu’il est très rare de le voir alors qu’il nage.
Ses écailles sont grandes. La couleur de sa livrée, grise, marron ou verdâtre, est extrêmement variable sous l’effet des chromatophores qui imitent le milieu environnant. Sur le dos qui est traversé des barres verticales marron-rougeâtres on observe d’élégantes et fines lignes mimétiques horizontales dorées qui, jointes à des traits irréguliers, vont de la tête au pédoncule caudal. Elles se poursuivent aussi sur les côtés où se trouvent cependant 8 taches très voyantes rhomboïdales et foncées en partie intercalées en partie basse avec d’autres taches plus petites.
La nageoire dorsale et les nageoires pectorales sont traversées par des bandes foncées de même que les lobes de la nageoire caudale qui comportent 3 à 5 bandes plus marquées.
La nageoire anale est jaune tout comme les nageoires pelviennes qui ont un pigment plus foncé entre les rayons. Le côté ventral de ce poisson est blanchâtre comme c’est en général le cas pour les espèces qui vivent sur les fonds.
Éthologie-Biologie reproductive
Synodus intermedius se nourrit principalement de poissons, en particulier de Haemulidae, tels que Brachygenys chrysargyreum et des espèces voisines, de Clupeiformes, tels que Jenkinsia lamprotaenia ou Jenkinsia majua, et même de divers prédateurs qui se déplacent sur les fonds comme Serranus tigrinus, Serranus baldwini, Serranus tabacarius et d’autres espèces appartenant à ce genre.
Son régime comporte souvent aussi des labridés et des turbots comme Bothus ocellatus qu’il trouve souvent à côté enfoui comme lui dans le sable.
Enfin il se nourrit aussi de mollusques avec une préférence pour les seiches et les calamars et de crustacés, surtout des crevettes.
Il épargne toutefois une minuscule et gracieuse crevette bleue, Ancylomenes pedersoni, qui se trouve parfois dans les “stations de nettoyage” où les gros poissons viennent se faire enlever les parasites de la peau.
Synodus intermedius, en plus d’un dermatologue qui le débarrasse des isopodes et d’autres petites espèces envahissantes, fait également appel, étant donné toutes les dents qu’il possède, à un dentiste consciencieux comme justement la crevette nettoyeuse de Pederson qui vit en symbiose avec des anémones de mer telles que Bartholomea annulata ou Condylactis gigantea.
Celle-ci, en effet, dès qu’elle le voit, abandonne avec une bande de camarades sa “turris eburnea” (tour d’ivoire) pour venir le libérer des minuscules débris alimentaires qu’elle trouve entre ses dents.
La reproduction de Synodus intermedius a lieu en général en été ou en automne mais est peu documentée. On sait seulement que les œufs sont pondus sur les fonds, qu’après leur fécondation les parents se séparent et qu’il n’existe pas de soins parentaux.
Sa résilience est médiocre, le doublement de ses populations ne pouvant s’effectuer qu’après 1,4 à 4,4 ans.
Sa chair a une faible valeur commerciale mais vu qu’il peut atteindre un poids de 1 kg, dans certains secteurs tels que Haïti, Synodus intermedius finit parfois à la casserole.
Sa vulnérabilité à la pêche reste quoi qu’il en soit modérée et s’établit à 36 sur une échelle de 100. Dans la Liste Rouge de l’UICN des espèces en danger il figurait en 2013 en tant que “LC, Least Concern”, c’est-à-dire “Préoccupation mineure”.
Synonymes
Saurus intermedius Spix & Agassiz, 1829.