Famille : Scaridae
Texte © Giuseppe Mazza
Traduction en français par Michel Olivié
Sparisoma cretense (Linnaeus, 1758) appartient à la classe des Actinopterygii, les poissons aux nageoires rayonnées, à l’ordre des Perciformes et à la famille multicolore des Scaridae, désignés sous le nom de Poissons-perroquets, qui nageaient déjà à l’Éocène inférieur et sont aujourd’hui essentiellement présents sous les Tropiques avec une dizaine de genres et une centaine d’espèces.
Le genre Sparisoma vient de “sparus” = javelot, nom que les Romains donnaient à une espèce comestible de poisson remuant et brillant comme un javelot et qui a été donné ensuite par Linné à la Daurade royale (Sparus aurata), et du grec ancien “σῶμα” (soma) = corps. Il signifie donc littéralement “qui a le corps d’un sparus” et cela à cause de sa forme qui est plus allongée que celle des autres poissons-perroquets et qui, dans l’ensemble, rappelle celle des Sparidae. Le nom de l’espèce cretense = de la Crète fait référence à la grande île grecque où il est très abondant.
Zoogéographie
Bien qu’il soit connu sous le nom de Poisson-perroquet de la Méditerranée, étant donné qu’il y est le seul Scaridae existant, on rencontre aussi Sparisoma cretense le long des côtes Est de l’Atlantique tempéré et tropical. Il est en effet présent depuis le Portugal, les Açores, Madère, les Canaries et le Cap Vert jusqu’au Sénégal, puis en Angola.
Écologie-Habitat
Sédentaire il évolue habituellement dans des eaux peu profondes bien qu’on en ait vu parfois aux alentours de 50 m sous la surface.
Il fréquente des milieux rocheux ou madréporiques et les herbiers de posidonies situés à proximité de fonds sablonneux qu’il enrichit, comme tous les scaridés, en broyant longuement les algues de même que leur support. Ce fait était déjà connu d’Aristote qui le qualifiait, par comparaison avec les bovins, de “poisson ruminant”.
Morphophysiologie
Sparisoma cretense peut atteindre 50 cm de long mais sa taille normale est d’environ 30 cm.
Son museau est arrondi. Ses dents maxillaires soudées entre elles sous la forme de deux plaques constituent un bec robuste de couleur blanche qui lui sert à racler les rochers ou les madrépores suivant la zone où il vit. Il possède d’autre part à l’intérieur de sa gueule de nombreuses dents pharyngées qui ressemblent à des molaires et qu’il utilise pour broyer ce qu’il a extrait. Elles sont portées en haut sur deux bandes par deux os qui s’appuient sur la base du crâne alors qu’au-dessous elles sont disposées en forme de mosaïque sur un seul os.
Il existe une seule nageoire dorsale qui débute à la hauteur des nageoires pectorales et possède 10 rayons épineux et 10 rayons mous. La nageoire anale, plus courte, a 2 rayons épineux et 10 rayons inermes. Les nageoires pectorales ont 12 rayons mous. Les nageoires pelviennes qui ont 1 rayon épineux et 5 rayons mous sont arrondies à leur extrémité. La nageoire caudale, qui comporte 15 à 19 rayons, est recouverte dans sa première partie par les écailles du grand pédoncule. Repliée elle paraît tronquée mais quand elle est déployée on remarque qu’elle est légèrement arrondie.
Il existe un net dimorphisme sexuel et, chose rare, les femelles sont beaucoup plus colorées que les mâles.
Leur corps rouge vif se détache d’une grande zone grise qui part de la bande jaune qui traverse les yeux, jaunes eux aussi , et atteint en dessus les premiers rayons de la nageoire dorsale. Il existe en plus une tache jaune et brillante dans la partie supérieure du pédoncule caudal. Les nageoires sont également rouges sauf les nageoires pectorales qui sont grisâtres comme le corps sur lequel elles se replient et qui portent des points blancs.
Les mâles, pour leur part, sont gris et tendent vers un teinte marron ou verdâtre et ont une tache noire au-dessus des nageoires pectorales et deux bandes foncées sur le menton. L’oeil est gris ou rougeâtre.
On pourrait le confondre à première vue avec d’autres espèces de la Méditerranée comme Labrus merula ou Symphodus tinca mais, si on les examine de près, elles s’en différencient par leurs grandes écailles cycloïdes imbriquées typiques des Scaridae.
À la différence de la plupart des Scaridae dont les femelles peuvent en grandissant se transformer en mâles le Poisson-perroquet de la Méditerranée est une espèce gonochorique dont les individus, une fois qu’ils ont atteint la maturité sexuelle, conservent le même sexe toute leur vie. Les mâles et les femelles ayant le même âge ont en fait la même taille.
La nuit les mâles tout comme les femelles changent de couleur et dorment parmi les algues mimétisés avec le fond.
Les premiers prennent une teinte foncée en ajoutant à leur livrée d’autres taches noires et quelques points blancs alors que chez les femelles le jaune devient gris et le rouge marron avec des taches mimétiques de couleur gris verdâtre.
Éthologie-Biologie reproductive
Sparisoma cretense est une espèce herbivore qui se nourrit en raclant les algues incrustantes, y compris les algues coralliennes, et en mâchant des posidonies mais il ne dédaigne pas les petits invertébrés qui les habitent ou qu’il trouve en broutant. Il se déplace souvent en petits groupes parfois mêlé à d’autres espèces.
Pendant la période de reproduction qui s’étend en Méditerranée de juillet à septembre et ailleurs de mai à décembre il existe deux possibilités d’accouplement.
On observe en effet des mâles âgés qui possèdent un petit harem et un territoire qu’ils ont défendu à coup de bec toute l’année et de petites bandes de mâles errants qui, si l’occasion se présente, féconde allégrement au passage les femelles prêtes à pondre.
L’accouplement s’effectue en général à l’aube ou au crépuscule. Il peut se faire isolément ou en groupe. Les oeufs flottants et les larves sont pélagiques pendant environ deux mois.
La livrée des juvéniles présente des tons brun orangé et souvent au début deux lignes claires sur les flancs.
Très pêché pour l’alimentation à l’époque romaine le Poisson-perroquet de la Méditerranée n’est plus recherché aujourd’hui par les consommateurs. Il peut dormir tranquille au fond de la mer. Sa résilience est bonne, ses effectifs pouvant doubler en 1,4 à 4,4 ans. Son indice de vulnérabilité est modéré et s’établissait en 2021 seulement à 36 sur une échelle de 100.
Synonymes
Scarus turchesius Valenciennes, 1840; Scarus pleianus Poey, 1861.