Famille : Brassicaceae
Texte © Prof. Pietro Pavone
Traduction en français par Michel Olivié
Cochlearia officinalis L. est une espèce de la famille des Brassicaceae, tribu des Cochlearieae, originaire du Nord et de l’Ouest de l’Europe et aujourd’hui répandue et naturalisée dans d’autres régions de l’Europe et en Amérique (Sud de l’Argentine). Dans ses régions d’origine elle vit sur les falaises du bord de mer, dans les crevasses des parois côtières, sur les plages de galets et dans les marais d’eaux saumâtres. Dans l’intérieur des terres elle a une préférence pour les endroits situés près des mines de sel mais elle peut pousser, grâce à sa capacité d’adaptation, dans des terrains sableux et argileux à condition qu’ils soient inondés périodiquement. Elle supporte des températures très basses.
Le nom du genre Cochlearia vient du latin “cochlear” = cuillère, en raison de la forme des feuilles basales. L’épithète de l’espèce vient du latin “officinalis”, nom donné au laboratoire de l’époque médiévale où l’on préparait les médicaments.
Cochlearia officinalis, communément appelée Cochléaire officinale ou Herbe aux cuillères, est une espèce herbacée bisannuelle ou vivace qui possède des racines pivotantes et fibreuses qui peuvent ancrer la plante dans tous les substrats. Sa tige est droite, haute jusqu’à 50 cm, anguleuse et ramifiée. Les feuilles basales qui ont une forme typique de cuillère sont entières, un peu succulentes et soutenues par de longs pétioles. Les feuilles caulinaires sont sessiles, cordiformes à leur base, amplexicaules et ont des dents grossières et pointues.
Les fleurs sont très parfumées et rassemblées sous forme de racèmes terminaux. Elles ont un calice constitué de quatre sépales verts et de quatre pétales longs de 6 mm, blancs, parfois teintés de violet.
La floraison a lieu d’avril à juin mais se prolonge parfois jusqu’au mois d’août. Elle est suivie par la formation des fruits qui sont de petites siliques, déhiscentes, ovoïdales, longues de 3 à 6 mm qui contiennent de petites graines à demi subsphériques de 1,2 à 1,5 x 0,9 à 1,3 mm, marron ou marron rougeâtre et dépourvues d’albumen.
Cochlearia officinalis est une espèce polymorphe, principalement d’origine autotétraploïde et de nombre chromosomique 2n = 24 . Elle est capable de s’hybrider avec d’autres espèces voisines telles que C. danica L. et C. anglica L.
Riche en vitamine C ou acide ascorbique elle a été abondamment utilisée au XVIe siècle pour sa propriété antiscorbutique. Pline l’Ancien (23-79 ap. J.C.) connaissait cette plante et ses propriétés médicinales mais on trouve les premières descriptions du scorbut dans le Papyrus Ebers, un texte écrit à Thèbes en 1550 av. J.C., qui, en plus de la description des symptômes, proposait des remèdes comportant l’utilisation de végétaux frais.
Les premiers symptômes de cette maladie consistent dans de la faiblesse, de la fatigue et des douleurs aux bras et aux jambes qui s’accompagnent d’une diminution des globules rouges et ont pour effet d’abîmer les gencives et de provoquer la chute des cheveux et une hémorragie cutanée. La mort est inéluctable si l’on ne trouve pas de remède.
Cette maladie se manifestait au cours des longs voyages en mer des navigateurs partis à la recherche de terres nouvelles. L’explorateur Vasco de Gama (1469-1524) perdit les deux tiers de son équipage alors qu’il se rendait en Inde en 1499. Magellan (1480-1521) en perdit plus de 80 % durant la traversée du Pacifique en 1520. Par la suite, grâce à l’utilisation de cette plante, les marins ne souffrirent plus de cette maladie au cours de longs voyages.
Cochlearia officinalis est également utilisée comme désinfectant du fait de la composition particulière de son huile essentielle surtout présente dans ses racines. Des études en laboratoire ont démonté en effet qu’elle a un effet inhibiteur sur la croissance de beaucoup de bactéries (Serriata marcescens, Bacillus subtilis, Escherichia coli, Mycobacterium phlei et Mycobacterium tuberculosis).
Cette plante a aussi des propriétés digestives, toniques, diurétiques et eupeptiques. Autrefois on s’en servait également pour soigner les paralysies et les rhumatismes.
Il existe dans le commerce divers produits qui utilisent cette plante tels que des gels désinfectants, des produits cosmétiques, des lotions destinées à favoriser la croissance des cheveux et des crèmes “scavanger” anti-radicales libres.
Les feuilles charnues, une fois pressées, peuvent fournir une bonne bière artisanale.
Cochlearia officinalis, en plus de la sous-espèce type C. officinalis subsp. officinalis L., comprend 2 sous-espèces reconnues, C. officinalis subsp. integrifolia (Hartm.) Nordal & Stabbetorp des îles Féroé, du Nord de la Russie d’Europe et de la Norvège et C. officinalis subsp. norvegica Nordal & Stabbetorp présente dans le Nord de la Russie d’Europe, en Norvège et peut-être aussi en Finlande.
Synonymes : Cochlearia alpina Sweet; Cochlearia atlantica Pobed.; Cochlearia flagrans Gilib.; Cochlearia kamtschatica Schltdl. ex DC.; Cochlearia linnaei Griewank ex Asch.; Cochlearia officinalis var. gallicica Pau; Cochlearia officinalis var. maritima Gren. & Godr.; Cochlearia officinalis var. typica G.Andersson & Hesselman; Cochlearia officinalis var. vidassiana Rouy & Foucaud; Cochlearia polaris Pobed.; Cochlearia polymorpha Syme; Cochlearia renifolia Stokes; Cochlearia rotundifolia Gray; Cochlearia vulgaris Bubani; Crucifera cochlearia E.H.L.Krause; Crucifera cochlearia var. officinalis (L.) E.H.L.Krause; Draba cochlearioides Langsd. ex DC.; Eutrema rossii Spreng.
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