Famille : Lacertidae
Texte © Dr. Carlo Zucchi
Traduction en français par Michel Olivié
Longue de 30 à 40 cm, queue comprise, la Lacerta bilineata est un des plus typiques et beaux lézards d’Europe © Giuseppe Mazza
Le Lézard vert occidental ou Lézard à deux bandes (Lacerta bilineata Daudin, 1802) est un des lézards d’Europe les plus reconnaissables, les plus caractéristiques et les plus beaux.
Le nom du genre Lacerta veut dire lézard en latin alors que le nom de l’espèce bilineata fait référence aux deux bandes dorsales claires présentes chez les femelles et les jeunes.
Zoogéographie
Lacerta bilineata est une espèce typique du centre Ouest de l’Europe. On la trouve dans le Nord de la péninsule ibérique, en France, dans l’Ouest de l’Allemagne, en Suisse, en Italie (sauf en Sardaigne et dans quelques petites îles) et dans l’île de Jersey.
Autrefois considérée comme une sous-espèce de Lacerta viridis elle est aujourd’hui classée comme un espèce à part. Il existe une zone de contact avec Lacerta viridis dans le Nord-Est de l’Italie.
Écologie-Habitat
Le Lézard vert occidental est une espèce craintive, diurne, héliophile, c’est-à-dire qui aime le soleil, et plutôt thermophile, autrement dit qui aime la chaleur.
Il est toujours attentif et circonspect et quand il perçoit un danger il court rapidement se mettre à l’abri dans une fissure de roche ou dans la cachette où il passe les mois d’hiver et qu’il a souvent empruntée à un petit rongeur.
Si on l’attrape par la queue, comme c’est habituellement le cas dans le monde des lézards, il l’abandonne au prédateur mais celle-ci repoussera. C’est un phénomène désigné en zoologie sous le nom d’autotomie.
Au sujet de la croyance populaire commune selon laquelle ce lézard, quand il mord un doigt, ne lâche plus prise c’est simplement le fait que lorsqu’il se retrouve en l’air il ne sait plus où s’échapper. Il suffit en fait de poser la main par terre de telle façon que ses petites pattes touchent le sol pour qu’on le voie aussitôt ouvrir la bouche en grand et s’enfuir précipitamment.
Il est répandu à basse et moyenne altitude mais dans la partie Sud de son aire de répartition il peut être présent jusqu’à environ 2.000 m.
C’est un assez bon grimpeur mais il préfère en général vivre au niveau du sol. Il a une prédilection pour les zones de transition entre des milieux différents, désignées scientifiquement sous le nom d'”écotones”, les milieux humides situés près de sa cachette et les secteurs où abondent des arbustes et des buissons qui offrent des sites favorables à la thermorégulation. On peut donc le rencontrer en bordure des bois, dans les clairières où il y a beaucoup d’herbes hautes, au milieu des ronces et de la végétation basse, sur des tas de pierres, dans les terres cultivées et dans les pâturages.
Les mâles ont les côtés de la tête et la gorge bleu azur vive surtout pendant la période de reproduction. Le corps, vert éméraude, a de nombreuses mouchetures noires © Giuseppe Mazza
Morphophysiologie
La Lacerta bilineata appartient au groupe de ce que l’on appelle les “lézards verts”. Ses dimensions sont moyennes à grandes. Il atteint 30 à 40 cm de long et un poids d’environ 35 g. Son corps est massif et élancé, ses pattes bien développées et sa queue, très longue, représente souvent à elle seule les deux tiers de son corps.
Sa tête est robuste et plus grande chez les mâles que chez les femelles. Son cou est dentelé. Les écailles dorsales sont carénées et son ventre a des écailles superposées aux bords anguleux et disposées en général sur 6 rangées.
Il n’existe pas d’autre part de granules surciliaires. Les écailles temporales sont moins de 20. Le bouclier rostral n’atteint pas les narines et il y a deux écailles post-nasales.
Elle se nourrit de vers, araignées, isopodes et insectes, comme cette libellule, mais aussi de baies et de jeunes vertébrés : sauriens, souris et petits oiseaux, œufs compris © Giuseppe Mazza
Les mâles se différencient également des femelles par la présence de pores fémoraux très visibles sur la partie ventrale des pattes arrière. Les côtés de la tête et la gorge ont une vive couleur bleu azur qui est très intense pendant la période de reproduction. Le corps est d’un beau vert émeraude et porte des mouchetures noires très nombreuses.
Les femelles, plus petites, portent une livrée verte ou brunâtre plus uniforme et ont souvent des taches noires sur le dos et 2 à 4 bandes longitudinales claires bordées de noir. Spécialement pendant la période suivant la fécondation leur tête peut également présenter des teintes de couleur azur mais qui sont moins vives que celles des mâles.
Les jeunes, dont le corps présente des proportions légèrement différentes, portent une livrée vert-marron peu marquée et ont deux ou quatre bandes pâles sur les flancs. Tous ont un ventre blanchâtre ou jaunâtre.
Une femelle. On voit très bien sur son dos les 2 bandes longitudinales claires qui sont à l’origine de l’appellation scientifique “bilineata” de cette espèce © Giuseppe Mazza
Éthologie-Biologie de reproduction
Une fois passée la période de repos hivernale la Lacerta bilineata est active de mars à octobre. Pendant les mois les plus frais il est facile de l’apercevoir durant les heures de la mi-journée alors qu’en plein été, quand la chaleur est excessive, elle se déplace en général tôt le matin.
Son régime se compose d’invertébrés comme des vers, des araignées, des isopodes et divers insectes mais aussi de baies sucrées et de petits vertébrés. Elle mange en effet de jeunes lézards, les petits de l’Orvet (Anguis fragilis), des souris nouveau-nées, des œufs et des poussins de petits oiseaux.
Au printemps les mâles dominants sont particulièrement nerveux et agressifs. Ils surveillent leur territoire en exhibant au maximum leur richesse chromatique. La posture qu’ils adoptent avec les pattes arrière dressées et leur gorge bleue azur bien mise en évidence pendant qu’ils fouettent l’air de leur queue est caractéristique et si ces signaux ne suffisent pas à dissuader un mâle adulte qui ose franchir leur frontière il se battra en duel pour son territoire et ses femelles.
Mâle subadulte. On note déjà les pores fémoraux sous les pattes arrière mais le corps doit encore se renforcer et il manque les couleurs bleu azur de la tête et de la gorge. Le Lézard vert occidental atteint la maturité sexuelle vers 2 ans et s’il ne finit pas dans la gueule d’un serpent, d’un rapace ou autres prédateurs il peut vivre jusqu’à 12 ans © Giuseppe Mazza
Les accouplements obéissent aussi à un rituel précis jusqu’à ce que le mâle, saisissant sa compagne sur un flanc, l’immobilise, se glisse sous son corps et introduise son hémipénis dans le cloaque.
En mai/juin, 3 à 6 semaines après la fécondation, la femelle pond 5 à 25 œufs blanchâtres, longs au début d’un centimètre et qui grossissent avec les pluies jusqu’à atteindre au maximum 18 mm, dans un petit trou profond d’une dizaine de centimètres creusé dans le sable et soigneusement refermé ou dans un lieu humide et chaud comme une souche en décomposition. Ils écloront entre août et octobre après environ 70 à 100 jours d’incubation. À leur naissance les petits mesurent 8 à 10 cm et ont une espérance de vie de 10 à 12 ans.
La Lacerta bilineata est la proie de serpents, de rapaces, de mustélidés, de hérissons et de renards sans parler, près des habitations, du chat domestique et des poules qui en grattant la terre peuvent trouver un petit.
Synonymes
Lacerta viridis bilineata Laurenti, 1768; Lacertus viridis Garsault, 1764; Lacerta chloronota Rafinesque-Schmaltz, 1810.